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A Avignon, dans « Close Up », Noé Soulier passe le mouvement à la loupe

Close Up, titre de la nouvelle pièce pour six interprètes du chorégraphe Noé Soulier, directeur du Centre national de danse contemporaine d’Angers depuis 2020, invité pour la première fois au Festival d’Avignon, touche à différents domaines. Si le verbe anglais signifie « fermer, se refermer », le terme « close up » évoque, dans l’art de la magie, un magicien qui exécute des tours de cartes à une très courte distance des gens pour mieux les bluffer. En photo et en cinéma, il fait référence à un type de cadrage serré, qui parie sur le zoom pour mieux donner l’illusion de pénétrer dans la matière.
Avec cet indice gros comme une maison, une opération de resserrage du propos finit effectivement par arriver au milieu du spectacle créé le 15 juillet, devant un public enthousiaste, à l’Opéra Grand Avignon. Changement de focale, une longue séquence se déploie en fond de scène devant une caméra posée sur pied qui ne bougera pas de son socle. Les interprètes se glissent dans un espace circonscrit par un panneau blanc, comme pour une prise de vues dans un studio de photo. Ils y passent et repassent, livrant des images fragmentées de leurs évolutions projetées sur un grand écran. Ils choisissent d’y inscrire telle ou telle partie de leur corps en mouvement.
Cette écriture cinématographique en direct de la danse, qui flirte parfois avec l’imagerie mode, pas loin de la pub pour des jeans, permet néanmoins d’avoir la sensation de presque toucher le muscle lié au geste, tout en ayant la possibilité de considérer l’ensemble de l’interprète lancé dans son enchaînement de pas.
Macro-micro, avant-arrière, ce jeu de plans est l’un des attraits ludiques de Close Up, où la gestuelle segmentée et physique, quasi athlétique, devenue la signature de Noé Soulier, éclate. Depuis les pièces Removing (2015) ou Les Vagues (2018), sous influence notamment de la danse classique, qu’il a pratiquée et décortiquée, ainsi que du sport, qui offre selon lui « un répertoire de gestes d’une richesse extraordinaire », il a mis au point une partition à partir de verbes d’action. Il creuse ici de nouveau autour de « frapper », « éviter », « lancer »… Tout en détentes sans cesse bloquées, la danse se déplie en lignes brisées : un interprète shoote dans un ballon (invisible), bifurque dans un lancer de javelot (inexistant), puis s’étire dans un immense plié au ras du sol.
Pour soutenir et tempérer ses salves intempestives, Noé Soulier a conçu Close Up en s’appuyant sur la musique de Bach jouée par les cinq musiciennes de l’ensemble Il Convito, installées sur un côté du plateau. Les œuvres contrapuntiques du compositeur de L’Art de la fugue déroulent une trame sur laquelle les interprètes rebondissent et fluidifient leurs bouquets gestuels aussi vite composés que décomposés.
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